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Parce que la reconnaissance au travail exige une véritable stratégie

Disgrâce du télétravail, bientôt chez nous ?

Encensé et vanté il y a peu de temps encore pour ses nombreux avantages, il semble aujourd’hui être en disgrâce. En effet, depuis quelques mois, nous observons une montée de commentaires négatifs et un désir de revenir en présentiel de la part des dirigeants. Selon l’enquête Microsoft Work Trend Index de septembre 2022, 88 % des dirigeants d’entreprises françaises considèrent le retour des employés sur site comme un enjeu. Il en est de même aux Etats-Unis où Apple, Disney, Twitter, JP Morgan Chase et bien d’autres battent le rappel.

Un exemple frappant est celui du directeur de Clearlink, récemment impliqué dans un bad buzz. Il a invité ses collaborateurs vivant à moins de 50 miles (environ 80 km) du siège social à revenir 4 jours par semaine et à donner leur « sang, sueur et larmes » à l’entreprise. Il est même allé jusqu’à féliciter un employé qui a vendu le chien de la famille en réponse à cette annonce.

Plusieurs raisons expliquent ce revirement d’opinion. Les dirigeants souhaitent favoriser l’innovation, accroître la productivité, garantir une communication efficace au sein des équipes, assurer la transmission des savoir-faire et éviter de constater un manque d’implication de la part des employés. Selon l’enquête Microsoft, 85 % des dirigeants avouent rencontrer des difficultés à faire confiance à leurs employés en ce qui concerne leur productivité depuis le passage au télétravail hybride.

Les résultats du Baromètre Télétravail 2022 du Comptoir de la nouvelle entreprise de Malakoff Humanis présentent une perspective différente. Selon cette enquête, 60 % des dirigeants estiment que le télétravail permet de réduire l’absentéisme, tandis que 69 % d’entre eux pensent qu’il améliore la productivité des employés.

Cette dernière partie semble  confirmée par le rapport du Conseil national de la productivité, qui indique que passer d’une proportion de 5 % de télétravailleurs avant la pandémie à 25 % à plus long terme pourrait générer un gain moyen de productivité de 5 à 9 %. Leur conclusion est soutenue par l’étude de la Banque de France, selon laquelle une augmentation d’un point de pourcentage du nombre d’employés en télétravail pourrait améliorer la productivité globale des facteurs d’environ 0,45 %.

Alors que les résultats semblent encourageants dans certaines entreprises, pourquoi d’autres adoptent une vision plus négative du télétravail ?

Le problème viendrait-il en grande partie de la politique de management ? Ou les dirigeants auraient-ils changé de paradigme trop rapidement pour, en fin de compte, n’en saisir que les côtés négatifs ?

Sûrement un peu des deux. Concernant le changement de paradigme, face à l’émergence du télétravail et à la transition vers des modèles de travail plus flexibles, certaines entreprises ont rencontré des difficultés à s’adapter et à faire évoluer leur culture organisationnelle, en particulier la culture du présentéisme. Dans de nombreux environnements professionnels, la présence physique au bureau est souvent considérée comme un indicateur de productivité et d’engagement, et les employés sont valorisés en fonction de leur disponibilité apparente.

Cependant, avec l’évolution des technologies et des attentes des employés, le télétravail et les modèles de travail flexibles sont devenus des alternatives viables, et même préférables dans de nombreux cas.

Le problème réside dans le fait que certaines entreprises ont changé de paradigme trop rapidement et ont alors essentiellement perçu le côté négatif de ce nouveau paradigme. Elles ont pu manquer l’occasion d’adopter une culture adaptée, des politiques de travail plus souples, de mettre en place des infrastructures technologiques et des formations adéquates des managers, mais aussi des collaborateurs pour permettre une transition en douceur.

Quant à la politique de management, ce n’est pas si étonnant si on considère que près d’un manager sur 2 est toujours réticent au télétravail (Baromètre du télétravail 2022 de Malakoff Humanis). Le travail à distance complexifie la posture du manager, sans compter que nombre d’entre eux n’ont pas toujours les ressources et les formations nécessaires pour effectuer leur travail sereinement. On s’éloigne du management traditionnel qui privilégie la présence physique au bureau et la supervision étroite des employés, quitte à freiner leur autonomie. Dans ce contexte, le télétravail peut être perçu comme un défi, car il nécessite un ajustement de la façon dont le travail est géré et évalué. Pourtant, 64 % des managers qui ont répondu à ce baromètre n’avaient pas changé leurs pratiques managériales alors que cette évolution demande un management davantage axé sur la confiance, l’encouragement, la prise d’initiatives et le droit à l’erreur.

L’implémentation de ces quelques pratiques peut être bénéfique dans un environnement de télétravail.

  1. Fixer des objectifs clairs : Établir des objectifs précis et mesurables permet aux employés de savoir ce qui est attendu d’eux et de se concentrer sur les résultats plutôt que sur les heures de travail.
  2. Communiquer régulièrement : Maintenir une communication ouverte et régulière avec les collaborateurs est essentiel. Les managers peuvent organiser des réunions virtuelles individuelles et d’équipe pour discuter des projets, des progrès et des défis. Par ailleurs les recherches de Brodsky(Université du Texas) et de Tolliver (directeur du management produit chez Vyopta) sur l’engagement des collaborateurs en télétravail, ont montré que d’une part le nombre de réunions non planifiées avaient bondi de 49 % et d’autre part que les employés qui se sont le moins joints aux réunions ont souvent, par la suite, démissionné ou ont été licenciés.
  3. Fournir un soutien et des ressources : S’assurer que les employés disposent des outils, des informations et du soutien nécessaires pour accomplir leurs tâches à distance. Les managers se doivent d’être disponibles pour répondre aux questions, fournir des conseils et aider à résoudre les problèmes
  4. Gérer la confiance : le sondage Microsoft indique que pour 90 % des managers Français avoir confiance en leurs collaborateurs est un défi (soit 5 points de plus que les autres managers dans le monde). Néanmoins, le télétravail repose sur la confiance mutuelle entre les managers et les employés. Les managers doivent être en mesure de faire confiance à leurs employés pour accomplir leurs tâches de manière autonome, sans la nécessité d’une surveillance constante qui serait contre-productive. De même, les employés doivent se sentir soutenus et faire confiance à leurs managers pour les aider en cas de besoin.
  5. Encourager l’autonomie et la responsabilisation : Donner aux employés la liberté de gérer leur travail et prendre des décisions appropriées. Cela renforce leur sentiment de responsabilité et favorise leur développement professionnel.
  6. Évaluer les résultats : Plutôt que de se concentrer uniquement sur les heures de travail, évaluer les employés en fonction de leurs résultats et de la qualité de leur travail. Cela met l’accent sur la performance réelle plutôt que sur la présence physique.

Pour conclure, il convient de noter que le télétravail réussi repose sur une combinaison de facteurs, y compris une gestion efficace, des outils technologiques adaptés ainsi que la création d’une culture d’entreprise qui favorise la responsabilité, la transparence et l’engagement. Il est important que les organisations et les managers reconnaissent l’importance de mettre en place une politique de management adaptée au télétravail, de repenser les pratiques managériales en favorisant la confiance, l’encouragement, et en donnant plus d’autonomie aux salariés. Le but n’est pas de passer en 100 % télétravail, mais de laisser le choix aux collaborateurs. Pour la majorité d’entre eux, la maturité sera au rendez-vous, mais la direction et le management le seront-ils ?

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